Communauté de la Dame de tous les peuples (Armée de Marie)
Les données contenues dans cette fiche ont été recueillies lors d’une recherche documentaire menée à l’été 2019 par Stéphanie Audet
Autres appellations
L’Armée de Marie ; Les Fils et les Filles de Marie ; The Community of the Lady of All Peoples ; The Army of Mary ; De Gemeenschap van de Vrouwe van alle Volkeren (hollandais).
Fondateur/fondatrice
Marie-Paule Giguère (1921-2015)
Groupe d’inspiration
chrétienne catholique (Église catholique romaine, dévotion mariale, eschatologie, traditionalisme)
Objectifs
- Se préparer à la fin du monde et à l’avènement du règne de Dieu tels qu’ils ont été annoncés à la fondatrice, Marie-Paule Giguère.
- Relever la famille en tant que cellule fondamentale de la société et de l’Église.
- Vivre dans l’abandon et l’obéissance totale à Dieu et au Chef de l’Église.
- Développer l’esprit de prière et l’esprit de communauté.
- Réformer intérieurement les humains.
- Étendre le message de la Dame de tous les peuples et faire reconnaître son culte.
- Assurer une continuelle dévotion à la Dame de tous les peuples, incarnée dans la fondatrice, Marie-Paule Giguère.
Présence
Lac-Etchemin (Québec), Ville de Québec (Québec), Tournai (Belgique), Pays-Bas
Nombre approximatif de membres
Nombre total inconnu.
Les Filles et Fils de Marie étaient au moins 127 en septembre 2011. En examinant leur histoire, il ne semble pas exagéré d’affirmer qu’ils ont déjà été plusieurs milliers. Mais aucune enquête ne permet actuellement de connaître le nombre, même approximatif, de leurs membres.
Description générale
Description brève
La « Communauté de la Dame de tous les peuples » est un groupe religieux issu du catholicisme traditionaliste qui favorise la dévotion mariale, c’est-à-dire la vénération de la Vierge Marie, mère de Jésus-Christ. D’abord connu sous le nom de l’« Armée de Marie », le groupe a rapidement pris de l’expansion dans les années 1970 et 1980. Il a donné naissance à de nombreuses branches associées, comme la Communauté et la Famille des Fils et des Filles de Marie, les Oblats-patriotes et l’Institut Marialys. Avec les années, le mouvement a développé des croyances nouvelles, différentes de celles qui sont courantes dans l’Église catholique romaine. Parmi ces croyances originales figurent l’incarnation de la Sainte Vierge en la fondatrice de l’association, Marie-Paule Giguère, une nouvelle Révélation complémentaire de la révélation biblique, la dévotion à la Dame de tous les peuples et la Quinternité. Les autorités de l’Église catholique ont pris des mesures pour prévenir leurs fidèles des déviances du groupe, tout en tentant d’éviter un schisme avec l’association nouvelle. La Communauté a toutefois continué à promouvoir ses propres dogmes en fonction des convictions de la fondatrice et des orientations données par les théologiens du mouvement. Le groupe et ses membres ont été officiellement excommuniés par l’Église catholique romaine en 2007. La Communauté de la Dame de tous les peuples a alors créé une institution parallèle, l’Église de Jean. La maison mère du groupe est aujourd’hui située au Centre eucharistique et marial Spiri-Maria de Lac-Etchemin. Le mouvement possède plusieurs immeubles tant à Lac-Etchemin que dans la ville de Québec. Le nombre précis de membres de la Communauté et de toutes ses branches reste inconnu. Le chiffre de 25 000 fidèles, repris par les journalistes depuis les années 1980, ne repose sur aucun fondement (Margry, 2013). Toutefois, il est certain que 127 hommes et femmes ont fait des vœux religieux en date du mois de septembre 2011 et ont porté l’habit des Fils ou des Filles de Marie.
Historique et controverses
L’histoire et l’identité de la Communauté de la Dame de tous les peuples sont fortement liées aux controverses qu’elle a suscitées, particulièrement dans l’Église catholique romaine, mais aussi dans les médias. Les deux aspects seront donc traités conjointement.
L’Armée de Marie a été fondée à l’été 1971 par Marie-Paule Giguère lors d’un pèlerinage au sanctuaire Notre-Dame-d’Etchemin à Lac-Etchemin, dans la province de Québec. La fondatrice faisait alors partie d’un groupe de chrétiens catholiques traditionalistes qui pratiquaient la dévotion mariale. Marie-Paule Giguère entretenait une relation particulière avec la religion depuis son enfance. Tout au long de sa vie, elle a soutenu avoir vécu plusieurs expériences d’ordre mystique comme le fait de recevoir des paroles et des visions de Dieu, de Jésus et de la Vierge Marie.
Le groupe catholique connut une rapide popularité. Dès septembre 1974, 338 membres participent à un pèlerinage en Europe. En raison de cette popularité, le 10 mars 1975, l’Armée de Marie obtient du cardinal Maurice Roy, archevêque de Québec, le statut d’association pieuse catholique. Afin de poursuivre ses activités et d’attirer plus de membres, le mouvement fit l’acquisition en août 1976 d’un immeuble sur la 26e rue à Québec. Cet immeuble fut le premier Centre international de l’Armée de Marie. Le groupe participait aux activités religieuses de l’Église catholique et organisait des célébrations dans les lieux de culte usuels. Le 4 juin 1978, il participe à une cérémonie à l’église Notre-Dame de Montréal. La fondatrice y apparut, vêtue de blanc et ceinte d’une couronne. Quelques mois plus tard, elle commença la publication de son autobiographie sous le titre de Vie d’amour. Cet ouvrage autobiographique relate les expériences mystiques de cette femme ainsi que les prédictions divines dont elle dit avoir été la bénéficiaire. En treize mois, treize des quinze volumes de l’ouvrage avaient été publiés.
Le 31 mai 1981, le groupe s’élargit : la Famille des Fils et des Filles de Marie ainsi que de la Communauté des Fils et des Filles de Marie sont fondées. Les Fils de Marie s’installent au Centre de l’Immaculée, un immeuble sur la rue de la Canardière à Québec, acheté en février 1980. Au début de l’année 1984, l’association achète la ferme Saint-Joseph à Lac-Etchemin, qu’elle transforme en un premier noviciat pour les Fils de Marie. En mai 1984, un grand pèlerinage est organisé à Lourdes et près de 2 000 membres de l’Armée de Marie y participent. Il s’agit de la onzième participation des fidèles de ce groupe à un pèlerinage. Lors de ces pèlerinages, la fondatrice développe un lien entre la dévotion mariale qu’elle propageait jusque-là et la dévotion à la Dame de tous les peuples, un culte populaire aux Pays-Bas. En juin 1984, un rassemblement des membres à l’Oratoire Saint-Joseph regroupe 4 000 participants. Quelques mois plus tard, le Père Denis Laprise quitte le Québec avec quinze Fils de Marie pour étudier à Rome à l’université pontificale Saint-Thomas-d’Aquin, dite Angelicum. Ils sont hébergés par les Pères Passionistes. Les relations du groupe avec d’autres associations religieuses paraissent normales et certains Fils de Marie sont déjà pressentis pour recevoir à Rome l’ordre du diaconat ou celui de la prêtrise.
Cependant, au Québec, l’Armée de Marie est l’objet de vives discussions avec les autorités religieuses. Des journalistes, mais aussi des membres du clergé catholique, émettent des avis contre le groupe, notamment à cause du comportement de la fondatrice, du contenu de ses livres et des investissements immobiliers de l’association. D’autres personnes prennent la parole dans certains journaux dans le but de défendre le mouvement. Le journal de l’Armée de Marie publie de nombreux textes faisant l’apologie du groupe et de la fondatrice. Certains de ces textes s’en prennent directement à certaines autorités catholiques. En 1985, les journaux publics annoncent que l’Armée de Marie est l’objet d’une enquête à la demande de l’archidiocèse de Québec. En même temps, d’anciens membres de la communauté se mettent à dénoncer certains abus financiers à l’intérieur du groupe. Le 17 décembre 1985, les membres du comité d’enquête de l’archidiocèse rencontrent les représentants de l’Armée de Marie. Le comité propose à l’Armée de Marie une série de recommandations dans le but de rectifier ce qui est alors considéré comme des déviances et l’archevêché accorde au groupe une période d’une année pour effectuer les changements requis. On s’entend pour garder confidentiels les résultats du rapport d’enquête. L’accord de confidentialité est toutefois rompu par le groupe lui-même qui publie le rapport en mars 1986.
L’Armée de Marie continue pourtant de se développer. En octobre 1985, trente-deux Fils de Marie vont rejoindre leurs collègues à Rome pour y étudier. En 1986, la Communauté des Fils et des Filles de Marie est mise sous la responsabilité de l’archevêque du diocèse de L’Aquila en Italie, Mgr Mario Peressin. Le 25 mai 1986, cinq Fils de Marie sont ordonnés à Rome par le Pape Jean-Paul II lui-même. Quelques jours plus tard, le groupe fonde les deux branches missionnaires masculine et féminine de l’Armée de Marie, soit les Fils et les Filles du Cœur de l’Immaculé de Marie. Le 15 août 1986, les Oblats-Patriotes sont également fondés en tant que nouvelle association au sein de l’Armée de Marie.
Dans les mêmes années, trois autres ouvrages créent la controverse au Québec. Il s’agit de L’homme total dans la terre totale et De la Trinité Divine à l’Immaculée-Trinité de Raoul Auclair (tous deux publiés en 1985) et du livre Le Rédempteur et la Co-Rédemptrice de Marc Bosquart (publié en 1986). Ces ouvrages exposent une théologie centrée sur la Vierge Marie et Marie-Paule Giguère. Le cardinal Louis-Albert Vachon, nouvel archevêque de Québec, publie alors deux notes dans Pastorale Québec, soit le 4 juillet et le 15 novembre 1986, condamnant spécifiquement le contenu des deux ouvrages de Marc Bosquart. Le 27 février 1987, le Cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (CDF) au Vatican, confirme les problèmes soulevés par les enseignements de Marc Bosquart et de l’Armée. À la suite des recommandations proposées plus d’un an auparavant par le comité d’enquête et en raison des propos tenus par certains responsables de l’Armée de Marie à l’encontre de membres du clergé catholique, l’archidiocèse de Québec demande aux dirigeants du groupe de signer une déclaration d’obéissance à l’archevêque. Le document stipule du même souffle que l’Armée de Marie doit demander pardon pour ses doctrines erronées. Les responsables refusent de signer le document. Dans la foulée de ces discussions, le cardinal Vachon émet le 4 mai 1987 un décret qui révoque le statut d’association pieuse dont l’Armée de Marie bénéficiant jusque-là. Ses dirigeants annoncent en conférence de presse le 7 mai 1987 leur intention d’aller en recours et de faire annuler la décision.
Ces péripéties n’empêchent la Communauté de prospérer : neuf Fils de Marie sont ordonnés par Mgr Peressin le 30 mai 1987. Même au Québec, le groupe poursuit ses activités. En 1988, il achète deux immeubles. La résidence Lamennais à Lac-Etchemin est renommée « Virgo Fidelis » et accueille les Filles de Marie ainsi que les oblates et oblats résidents. L’immeuble de l’avenue Mont-Thabor à Québec nouvellement acquis sert de secrétariat, d’atelier et de librairie.
Le 25 mars 1988, le président du Conseil Pontifical pour les laïcs, le Cardinal Eduardo Pironio, ratifie la décision du 4 mai 1987 de l’archevêque de Québec et refuse ainsi à la Communauté tout possibilité de recours. Celle-ci décide de faire appel au Tribunal Suprême de la Signature Apostolique à Rome. Dans le même temps, en 1988, la Communauté commence à utiliser l’appareil judiciaire civil contre ses opposants. Une première mise en demeure de 350 000 $ est déposée contre L’Informateur catholique, Spiri-média (le bureau d’édition) et Paul Bouchard (le fondateur du journal). Une autre mise en demeure de 300 000 $ est déposée contre le réseau de télévision québécois « Quatre Saisons ». Les différends se règlent hors cours. Finalement, le 17 mars 1989, le Tribunal Suprême du Vatican refuse le recours demandé par l’Armée de Marie. En avril 1991, tous les recours de l’Armée de Marie ont été rejetés et le décret du cardinal Vachon devient définitif. La Communauté n’est dès lors plus reconnue comme une association catholique.
Malgré la perte de leur statut et les avertissements du cardinal Vachon, l’Armée de Marie continue de connaître une certaine popularité. Le Père Pierre Mastropietro devient en novembre 1989 supérieur général des Fils de Marie. En 1991, la communauté comporte alors 66 Fils de Marie dont 24 Pères, et 69 Filles de Marie. En février 1992, l’Armée fait l’acquisition à Québec d’un nouvel immeuble qui sert de logement, de secrétariat, d’atelier et de boutique d’objets religieux. Mais, le 27 mai 1992, le Pape Jean-Paul II salue de nombreux groupes religieux parmi lesquels figure l’Armée de Marie, à qui il souhaite un pèlerinage spirituellement constructif, ce qui implique que le groupe correspond aux standards de l’Église. Quatre jours plus tard, le groupe fonde l’Institut Marialys à Rieti en Italie. En 1994, une grande annexe est construite à la ferme Saint-Joseph et l’édifice est renommé Marienthal. Tout au long de ce parcours, des évêques en Ontario, en Nouvelle-Écosse, en France, en Italie, en Autriche et en Jamaïque demandent l’aide des Fils et des Filles de Marie pour leur évêché ou pour l’établissement de missions. Plus de cinquante Fils de Marie sont ordonnés diacres ou prêtres un peu partout en Occident.
Le 31 mai 1996, la prière et le culte public de la Dame de tous les peuples sont autorisés par l’évêque de Haarlem, aux Pays-Bas, sans que les apparitions d’Amsterdam soient officiellement reconnues par l’Église catholique. L’Armée de Marie conçoit cet événement comme une victoire. Plusieurs Filles et Fils de Marie commencent alors à quitter les diocèses où ils œuvraient pour revenir au Québec. En janvier 1997, comme les relations avec leur protecteur, Mgr Peressin, se dégradent, les Fils de Marie quittent l’archidiocèse de L’Aquila en Italie. En avril 1997, Marie-Paule Giguère revêt l’habit religieux. Elle est élue supérieure générale des Filles de Marie et prend le nom de Mère Paul-Marie. Comme le groupe s’étend à l’international, une rencontre est tenue en 1998 au Québec avec les présidentes de la Communauté de la Dame provenant d’Europe et du Chili.
Le 25 mars 2000, un nouveau centre de l’Armée de Marie est inauguré à Lac-Etchemin. Sous le nom de Centre eucharistique et marial Spiri-Maria, il devient la maison mère du groupe et plusieurs membres s’y installent. En réaction à cette nouvelle construction qui n’a pas été autorisée, l’archevêché commence à prendre certaines mesures. Le nouvel archevêque, Mgr Maurice Couture, envoie une note disciplinaire à l’association le 12 avril 2000. La note est rendue publique le 15 mai 2000 dans Pastorale Québec. En réponse, l’Armée de Marie accuse l’archidiocèse de propager des mensonges, refuse de qualifier ses dogmes d’erreurs doctrinales et poursuit ses activités. En août 2000, la communauté achète un nouvel immeuble à Lac-Etchemin pour y rapatrier la maison d’édition du journal et des ouvrages du groupe, de même que le secrétariat, l’atelier et l’entrepôt. Quelques jours plus tard, en raison de la santé fragile de la fondatrice, le Père Pierre Mastropietro devient co-directeur de la Communauté alors que le Père Victor Rizzi est nommé supérieur général des Fils de Marie.
Le 15 août 2001, une note doctrinale de la Conférence des Évêques catholiques du Canada (CÉCC) est diffusée sur internet. Elle affirme que l’Armée de Marie n’est plus une association catholique en raison d’erreurs doctrinales dans son enseignement et de sa désobéissance à l’autorité catholique malgré les nombreuses interventions visant à amener l’organisme à se rétracter. Rapidement, de plus en plus de Fils et de Filles de Marie sont obligés de quitter leur mission ou leur poste dans différents diocèses et de revenir au Québec.
La Communauté poursuit pourtant ses activités, stimulée par le fait que Mgr Jozef Punt, évêque de Haarlem aux Pays-Bas, signe en 2002 un décret reconnaissant le caractère surnaturel des apparitions de la Dame de tous les peuples à Amsterdam. Le 1er janvier 2003, « Radio Amour » devient le portail officiel sur internet des activités religieuses de la Communauté. Puisque l’Armée de Marie poursuit ses activités, le cardinal Marc Ouellet, archevêque de Québec, publie le 4 avril 2005 un message pastoral contre l’Armée de Marie. De son côté, le Commissaire pontifical des Fils de Marie pour le Vatican, Mgr Terrence Prendergast, tente de préserver les liens avec les Fils de Marie et l’Église en demandant à ceux-ci de rompre leur attachement à la Communauté de la Dame de tous les peuples en attendant la fin des différends avec l’Église. Les Fils qui refusent doivent abandonner leur ministère. Les lettres prenant la défense de cette communauté continuent de paraître dans le journal du groupe. Un point de non-retour est franchi en 2006 avec la tenue de plusieurs activités religieuses au Centre Spiri-Maria : un baptême le 1er janvier, un mariage en juin et une cérémonie de préparation à la fondation de l’Église de Jean en août. La Communauté procède le 17 septembre 2006 à l’intronisation du Père Pierre Mastropetro au titre de chef de l’Église de Jean sous le nom de Padre Jean-Pierre Mastropietro. Celui-ci ordonne cinq Fils de Marie en janvier 2007. Il s’ensuit le 31 mai 2007 la fondation officielle de l’Église de Jean, la promulgation du dogme de Marie co-rédemptrice, médiatrice et avocate, présente en Marie-Paule Giguère et se nommant Dame de tous les peuples. Les ordinations se poursuivent tandis que le Padre canonise l’écrivain Raoul Auclair.
Les responsables de la nouvelle Église s’octroient ainsi des fonctions réservées aux plus hautes autorités de l’Église catholique comme l’ordination et la canonisation. Ils propagent également des dogmes qui ne sont pas reconnus par l’Église catholique. En prenant connaissance de l’ensemble de ces événements, le 19 juillet 2007, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi excommunie l’Armée de Marie, ses œuvres connexes et ses membres. Deux jours plus tard, le document est rendu public sur le site web de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CÉCC). Même si beaucoup de fidèles quittent le mouvement après le rejet total du groupe par l’Église catholique, cette expulsion n’est pas perçue négativement par les responsables du mouvement qui peuvent dès lors promouvoir leurs convictions en toute liberté. D’ailleurs, à partir de ce moment, les actions entourant la fondatrice s’accélèrent d’année en année : le 31 mai 2008, Marie-Paule Giguère reçoit le titre de souveraine de la Terre entière et nomme les douze apôtres de la nouvelle Église de Jean ; le 31 mai 2009, elle assiste en tenue royale à sa propre canonisation par le Padre Jean-Pierre Mastropietro. Le 13 septembre 2009, une photo officielle de Mère Paul-Marie est placée à côté de la statue de la Dame de tous les Peuples. Le 31 mai 2010, Marie-Paule est sacrée docteur de l’Église pour son œuvre Vie d’Amour et Marc Bosquart est nommé roi de l’Église sous le nom de Marc-André Ier. Il pose son premier geste officiel en déclarant « Marie-Paule, Mère du Royaume ». Le 3 juin 2012, trois écriteaux sont dévoilés officiellement dans la chapelle du groupe : ils représentent les étapes de la révélation du Mystère de Marie-Paule et le troisième déclare que « Marie-Paule est Dieu ».
Marie-Paule Giguère meurt le 25 avril 2015. La Communauté est maintenant dirigée par Padre Mastropietro, considéré désormais comme le Saint-Père, et Marc Bosquart comme le roi universel de l’Église de Jean. Les membres poursuivent leurs activités religieuses principalement à Lac-Etchemin.
Convictions fondamentales des membres
La Communauté de la Dame de tous les peuples puise ses convictions d’abord dans le christianisme catholique, mais en y ajoutant les expériences mystiques de la fondatrice et les écrits d’auteurs ayant développé les expériences de Marie-Paule en sommes théologiques. Au départ, le mouvement s’inspire de l’Église catholique en encourageant la dévotion à ce qu’il appelle les « trois blancheurs » (l’Eucharistie, le Pape et la Vierge Marie), mais avec une insistance particulière sur la dévotion mariale. Après sa fondation dans les années 1970, le mouvement manifeste cette dévotion en favorisant la participation à de nombreux pèlerinages reliés à la Sainte Vierge à travers le monde. S’appuyant sur ses pèlerinages et ses lectures, la fondatrice relie sa propre expérience à différentes autres expériences mystiques pour établir les fondements de sa foi. Parmi les événements mystiques qui l’inspirent se trouvent les expériences de Bernadette Soubirous à Lourdes (France), celles des voyants de Fatima (Portugal) et celles de Ida Peerdeman (Pays-Bas). Les expériences de Ida Peerdeman ont particulièrement influencé les convictions de la Communauté de la Dame de tous les peuples. Cette mystique affirme avoir bénéficié de cinquante apparitions de la Vierge Marie entre le 25 mars 1945 et le 31 mai 1959. C’est par son intermédiaire que la Vierge aurait demandé à être invoquée sous le nom de « Dame de tous les Peuples ». Une prière ainsi qu’une image de la Dame auraient aussi été confiées à Ida Peerdeman au cours de visions. Les messages reçus concernent également certains événements futurs touchant l’Église et le genre humain. La visionnaire affirme aussi que la Dame lui a demandé de faire reconnaître par l’Église catholique le dogme de Marie co-rédemptrice, médiatrice et avocate. Néanmoins, la reconnaissance du culte de la Dame de tous les peuples a toujours fait l’objet de débats au sein de l’Église catholique. En plus des trois apparitions mentionnées, la Communauté de la Dame de tous les peuples s’est également inspirée des apparitions et autres phénomènes surnaturels concernant une statue de bois de la Vierge à Akita, au Japon, entre 1973 et 1981.
C’est à partir de ces mystères que Marie-Paule Giguère explique les expériences mystiques qu’elle relate dans son autobiographie, Vie d’Amour. Cet ouvrage est d’ailleurs considéré comme l’« Œuvre de la Dame de tous les peuples » et aurait été dicté directement par Dieu (Vie d’Amour, Appendice 1, p. 283). Les révélations privées de Marie-Paule Giguère sont donc comprises comme une nouvelle révélation, censée venir compléter et bonifier l’Évangile chrétien. Vie d’Amour est le fondement de la théologie de la Communauté. Les révélations faites à Ida Peerdeman y sont présentées comme des prophéties annonçant l’incarnation de la Vierge Marie en Marie-Paule Giguère. À l’approche des derniers temps, l’Immaculée prend le nom de Dame de tous les peuples. La Dame révèle son identité. Elle fait vivre certaines expériences mystiques à des voyantes et leur révèle entre autres le dogme de Marie co-rédemptrice, médiatrice et avocate afin que celles-ci préparent le monde à l’Apocalypse. Afin de former une armée pour vaincre Satan, la Dame se serait incarnée en Marie-Paule Giguère. Le groupe croit profondément en la venue prochaine de la fin des temps et en la nécessité de s’y préparer. Le développement eschatologique du mouvement s’inspire de l’Apocalypse de Jean et de la théologie apocalyptique de Saint Louis-Marie Grignion de Montfort (1673-1716). Marie s’y trouve représentée comme la Vierge de l’Apocalypse, celle qui vaincra le Mal à la fin de temps. Il est à noter que la visionnaire Ida Peerdeman s’était distanciée de l’Armée de Marie dans les années 1990 et n’entendait s’associer ni au groupe de Marie-Paule Giguère ni à sa théologie. Les partisans du culte de la Dame de tous les peuples aux Pays-Bas ne partagent pas les mêmes croyances que la Communauté de la Dame de tous les peuples du Québec.
Deux auteurs puisent dans l’ouvrage de Marie-Paule afin d’élaborer les bases théologiques du mouvement. Raoul Auclair expose la théologie de la co-rédemption. Il développe d’abord le concept d’une quatrième entité à l’intérieur de ce qu’il est convenu d’appeler la Sainte-Trinité. Dans l’Église catholique, la Sainte Trinité est composée du Père (Dieu), du Fils (Jésus) et de l’Esprit-Saint. Raoul Auclair y ajoute l’Immaculée. L’Immaculée est divine et se trouve présente en Dieu depuis le début des temps. Elle participe à la création en coopérant avec Dieu lors des sept jours de la création. Avec Dieu, l’Immaculée forme un couple divin d’où est engendré le monde. Lorsque Marie de Nazareth accepte de se soumettre au plan divin et donne son consentement pour mettre au monde le Messie, elle incarne celle qui a été conçue sans péché, l’Immaculée. Elle met au monde l’homme nouveau, le Nouvel Adam, Jésus, celui par qui Dieu prit chair. Elle devint ainsi la mère des Vivants. Le rôle de co-rédemptrice de l’Immaculée ne consiste pas seulement à mettre au monde le Rédempteur (Jésus-Christ). Ce rôle comprend aussi des actions concrètes pour l’établissement du Royaume de Dieu à la fin de temps. Les apparitions, qui commencent en 1531 à la Guadeloupe, font partie des gestes posés par l’Immaculée pour sauver l’humanité. Les sept jours de la Création sont repris métaphoriquement pour diviser l’histoire humaine en sept âges, le septième âge étant celui de l’établissement du Royaume de Dieu. Ceux qui atteindront ce Royaume font partie d’une classe sociale « banale ». La théologie de la banalité s’oppose à la modernité et aux institutions considérées comme corrompues. Ce sont les gens simples et ordinaires qui peuvent accomplir leurs devoirs de bons chrétiens et accéder au Royaume des cieux.
Marc Bosquart ajoute quelques ouvrages à la collection théologique de la Communauté de la Dame de tous les peuples. Il analyse en détail l’autobiographie de Marie-Paule Giguère et tente de structurer les fondements théologiques de ses expériences et d’autres manifestations associées à la Vierge Marie. Contrairement à Raoul Auclair, cet auteur propose une double Trinité : la première qui demeure la même que celle de l’Église catholique et une deuxième Trinité qui est composée de Marie Immaculée, Marie-Paule Giguère et l’Esprit-Saint. Dans cette optique, l’histoire est également divisée en âges. La Vierge Marie était la co-rédemptrice de l’Âge de l’Église alors que Marie-Paule Giguère devient la co-rédemptrice de l’Âge de la Nouvelle Église, celui du Royaume de Dieu. Le rôle de Marie-Paule Giguère est alors celui de Mère de la nouvelle Église, celle du septième jour. Même si elle a été mariée et a eu cinq enfants, la fondatrice est considérée comme spirituellement vierge.
Marc Bosquart présente la cosmologie du mouvement en 2002 et 2003 dans trois autres ouvrages. Il y décrit un monde en forme d’œuf. Cet œuf contient des états supérieurs (le paradis terrestre et le paradis supérieur) et des états inférieurs (le purgatoire et l’abysse) avec, au centre, la Terre. L’humain est composé d’un corps physique, d’un corps psychique (âme inférieure mortelle) et d’un corps spirituel (âme supérieure immortelle). Cette cosmologie emprunte à d’autres religions. Les membres expliquent ces emprunts au nom de l’universalité de la Dame de tous les peuples.
De nombreux démêlés avec l’Église catholique romaine servent à façonner la doctrine du groupe mais donnent du même coup une image négative de l’Église. Les responsables présentent l’Église comme une force souhaitant conserver sa maîtrise sur Dieu lui-même en refusant les nouvelles révélations divines, ce qui ne les empêche pas de considérer le Renouveau charismatique catholique comme une œuvre du démon. À la suite des avertissements des autorités de l’Église catholique, les autorités du groupe voient dans la persécution dont ils sont victimes une sorte de légitimation de la véracité de leur message. Comme les premiers chrétiens, c’est parce que le groupe propose de nouvelles vérités qu’il est persécuté. L’histoire de l’Armée de Marie et de sa fondatrice est mise en parallèle avec la vie de saints catholiques qui ont vécu la marginalisation de la part de l’Église avant d’être vraiment reconnus. Sainte-Jeanne d’Arc et Padre Pio sont parmi les principaux exemples utilisés. Dans certaines visions, Marie-Paule Giguère aurait elle-même été prévenue qu’elle serait ainsi persécutée, ce qui amène les croyants à considérer comme inévitable et même nécessaire la rupture avec l’Église. Fondée à partir de ce mouvement, l’Église de Jean est perçue comme celle qui succède à l’Église de Pierre (Vatican). Cette nouvelle Église est reliée au royaume terrestre présentée dans l’Apocalypse de Jean. La fondation de cette nouvelle Église est aussi reliée à des prédictions faites par certains prophètes mystiques comme Sainte Hildegard de Bingen (1098-1179), Nicolas Berdiaeff (1874-1948) et Adrienne Von Speyr (1902-1967). Continuant de s’appuyer sur des textes historiques, les membres considèrent le schisme d’avec l’Église catholique comme un accomplissement de la prophétie de Saint-Malachie (1094-1148).
Avec la formation de l’Église de Jean, les dogmes de la Communauté vont se préciser. Marie-Paule Giguère s’affirme de plus en plus comme l’incarnation de l’Immaculée et l’égal du Rédempteur. De ce fait, elle est considérée comme étant de même nature que le Christ et elle est présente dans l’Eucharistie avec Jésus. La fidélité à Marie-Paule Giguère devient un élément central de cette conception du christianisme puisque c’est par elle que passe la rédemption. La double Trinité devient une Quinternité. Ce dogme précise que Dieu, tout en étant qu’un, est en fait cinq : Dieu (le Père), Jésus (le Fils), le Saint-Esprit, Marie l’Immaculée (la Mère) et Marie-Paule Giguère (la Fille). Marie-Paule Giguère se trouve donc intégrée au divin. Elle est considérée au même niveau que Dieu, Jésus-Christ et l’Esprit-Saint. De ce fait, elle cumule de nombreux titres comme ceux de Mère du monde, de Souveraine de la Terre, etc. Sur cette lancée, le mouvement intègre des éléments de numérologie religieuse comme il est possible d’en observer dans certains courants du judaïsme et du christianisme. Le chiffre 5 représente la Quinternité et devient ainsi sacré. Le symbole de l’action de la Dame de tous les peuples se présente sous la forme du nombre 55 555 à l’opposé du nombre de la bête, 666, un chiffre présent dans l’Apocalypse de Jean.
Structure et organisation
La Communauté de la Dame de tous les peuples comprend cinq œuvres : l’Armée de Marie, la Famille des Fils et des Filles de Marie, la Communauté des Fils et des Filles de Marie, les Oblats-patriotes et l’Institut Marialys. L’Armée de Marie est le noyau fondateur du mouvement avec, comme figure centrale, Marie-Paule Giguère et, comme théologiens, Raoul Auclair et Marc Bosquart. Les membres se nomment les Chevaliers de Marie. Ils doivent prier, assister à la messe, communier, réciter le chapelet et faire un quart d’heure de lecture spirituelle, tout ceci, quotidiennement. Ils doivent aussi défendre certaines valeurs chrétiennes traditionnelles comme la foi, l’espérance et la charité, le respect des dix commandements de Dieu. La dévotion à la Vierge Marie est jugée essentielle. Tous sont tenus de participer aux processions, de transmettre l’enseignement religieux. Le chant grégorien tient une place de choix dans les liturgies et il faut apprendre à le chanter correctement. Tous sont encouragés à participer à des pèlerinages. Il est attendu que tous les membres doivent apporter leur aide à la communauté et s’entraider en participant aux travaux et tâches des différentes œuvres.
La Famille des Fils et des Filles de Marie a été fondée en mai 1981. Le but de cette œuvre est de relever la famille, considérée comme l’élément central de l’Église et de la société. Les responsables laïques de cette œuvre sont appelés « Mamans ». La devise de la Famille est « Totus tuus (je suis tout à toi, Marie) ». Les membres de la Famille reçoivent lors de leur adhésion à l’œuvre un habit de chœur qu’ils doivent porter lors des cérémonies : il s’agit d’un manteau royal bleu et or ainsi que de la médaille miraculeuse. Il y a toutefois une distinction à faire entre les adultes et les plus jeunes. Les adolescents portent la cape plutôt que le manteau et les benjamins portent la pèlerine. La mission de l’œuvre consiste à défendre la foi, servir le Christ et Marie, tout en participant activement à empêcher le triomphe de Satan sur terre.
La Communauté des Fils et des Filles de Marie est un ordre religieux de frères et de sœurs. Elle a à sa tête une mère ou un père spirituel. Les adhérents se nomment Fils de Marie et Filles de Marie. Les prêtres du mouvement sont issus des Fils de Marie. Les membres de cette œuvre doivent tenter d’imiter la Vierge Marie dans tous les aspects de leur vie. Ils doivent servir la volonté divine telle qu’exprimée dans la Bible et dans l’œuvre de Marie-Paule Giguère. La Communauté se divise en quatre branches : la branche contemplative, la branche missionnaire, la branche hospitalière et la branche enseignante. Les Filles de Marie portent une robe blanche avec pèlerine, un voile blanc, une ceinture bleue avec le rosaire et la médaille miraculeuse. L’habit du Fils de Marie est composé d’une tunique blanche et d’un scapulaire bleu ou blanc réservé aux profès pour les offices religieux. Ils portent au cou la médaille miraculeuse et un rosaire est fixé à leur ceinture bleue.
Il est possible de trouver sur le site web de la Communauté un exemple détaillé de la façon dont se déroulent les journées des Fils et Filles de Marie. En somme, il leur est recommandé de participer tous les jours aux dévotions et célébrations religieuses, d’accomplir des tâches nommées « devoirs d’état » comme de prier, de lire les ouvrages spirituels recommandés, d’apprendre des langues étrangères, également de réciter ensemble vêpres et complies de même que le chapelet. Une journée par mois est consacrée à une retraite et, une fois par an, les membres se rassemblent pour plusieurs journées de retraite. Dans le passé, l’ordre a été impliqué dans des œuvres missionnaires, dans le service aux évêques et le service aux personnes âgées résidant à la résidence « Virgo Fidelis » de Lac-Etchemin. Les Fils et Filles de Marie ont aussi comme devoir d’aider les personnes défavorisées par la confection d’objets artisanaux qui sont ensuite offerts aux démunies ou vendus à ceux qui veulent aider la cause. Certains enseignent aussi les bases de la doctrine du groupe à l’intérieur de cours de catéchisme. L’ordre s’occupe de retraites d’été pour le ressourcement spirituel des plus jeunes. Les membres communautaires sont au service de l’Armée de Marie et de ses œuvres connexes afin de pourvoir aux besoins des divers secrétariats : administration, édition, courrier, librairie, organisation de pèlerinages, comptabilité. Les Filles de Marie accomplissent beaucoup de tâches reliées à l’artisanat, tandis que les Fils de Marie sont impliqués dans la fabrication de statuettes et de cierges et s’occupent de la Miche d’Or où ils confectionnent du pain et des pâtisseries.
Les Oblats-patriotes visent à promouvoir la doctrine sociale de l’Église. Les membres font la promotion d’un patriotisme religieux où l’État et l’Église doivent s’unir. L’Oblat-patriote doit se dévouer à Marie et tenter d’intégrer sa dévotion à tous les niveaux de sa vie personnelle, professionnelle, politique. Il est tenu de militer pour que les lois promulguées par les autorités soient conformes à la volonté divine et aux convictions du groupe. En plus de l’action publique, la liturgie, la méditation et la charité font partie du quotidien de chacun. Les Oblats-patriotes ont comme symbole une croix enveloppée d’une fleur de lys blanche, les deux surplombant la terre. Leur devise est « Dieu premier servi ». Les membres portent lors des cérémonies un manteau noir et blanc avec l’emblème de leur groupe en évidence sur l’épaule gauche.
Fondé en 1992 à Rieti en Italie, l’Institut Marialys a pour objectif de réunir les Fils de Marie qui ont été ordonnés prêtres et de veiller au relèvement de la jeunesse grâce à l’enseignement religieux. Les membres de l’Institut font alors la promesse d’engagement et d’enseignement. La devise de cette œuvre est : « Vers la Lumière ». Plusieurs prêtres s’y engagent de même que de nouveaux membres laïcs appelés Marialystes.
Les fidèles peuvent faire partie de l’Armée de Marie à différents titres suivant les œuvres dans lesquelles ils s’engagent : les Fils et Filles de Marie sont des religieux et des religieuses, les membres affiliés peuvent être prêtres, les membres associés et les membres auxiliaires sont des laïcs benjamins, adolescents ou adultes, les Oblats sont des laïcs, il y a aussi les Oblats-Patriotes, les Mères (en charge des familles), les membres de la communauté, les consacrés au Cœur de Jésus et de Marie. Un membre peut endosser plusieurs titres : un Fils de Marie peut être un prêtre et aussi un consacré.
Depuis le décès de la fondatrice, Padre Jean-Pierre Mastropietro, chef de l’Église, et Marc-André Ier, roi de l’Église, sont à la tête de l’ensemble du mouvement. La Communauté de la Dame de tous les peuples a réussi à créer un environnement social et idéologique fermé par la construction du Centre Spiri-Maria. La Communauté pratique une vie presque indépendante avec des immeubles pour les résidentes et résidents ainsi que des activités économiques comme la vente de pains et de pâtisseries à la Miche d’Or. Le mouvement possède aussi des établissements pour le noviciat, des résidences pour les retraites spirituelles, des ateliers, des cuisines, des maisons d’invités, une maison d’édition et une station de radio. Dans un bâtiment du site de Lac-Etchemin, la boutique Le Rosier d’or vend des objets à caractère religieux, très semblables à ceux que l’on retrouve en contexte catholique. Ces objets sont néanmoins adaptés aux convictions de la Communauté. Lors du décès d’un membre de la Communauté, c’est le service funéraire Omega de la vie, propriété du mouvement, qui se charge des funérailles.
Les membres peuvent demeurer informés de ce qui se passe à l’intérieur du groupe, des liturgies et de la doctrine, grâce à différents médias. Tout d’abord, un journal spécifique, qui s’est d’abord appelé L’Armée de Marie. En septembre 1976, il est devenu simplement Marie, puis a pris le nom de L’Étoile en mai 1979. Enfin, il est devenu Le Royaume en mai 1982. Il est publié tous les deux mois et chaque numéro compte en général vingt-quatre pages. Il est distribué au Canada, aux États-Unis et en Europe. Le journal est accessible sur le site internet du groupe, ce qui permet une large diffusion de certains textes et la conservation et la consultation des archives. Le groupe possède une radio, Radio Amour, qui diffuse depuis le centre Spiri-Maria au Lac-Etchemin des messes et des chapelets. Les vidéos sont disponibles en différé. Le site permet entre autres d’écouter le catéchisme enregistré par le Père Philippe Roy, des concerts, des cérémonies spéciales. Enfin, des vidéos et des audios sont mises en ligne sur une chaîne YouTube. Le groupe a sa propre chorale qui porte le nom de Chorale de l’Immaculée. Elle a déjà compté près de 150 membres. La chorale exécute des chants religieux spécifiques au groupe pour les célébrations, mais également des chants du répertoire classique. Elle est habituellement accompagnée à l’orgue, avec parfois d’autres instruments. La chorale tient des concerts sacrés ainsi que des pastorales de Noël. En plus de divertir les membres du groupe, elle permet la formation des plus jeunes et contribue à l’élévation spirituelle de tous. À Lac-Etchemin, on organise des activités pour former la jeunesse dans un cadre traditionnel. Les filles participent aux ateliers d’artisanat ou de cuisine donnés par des dames bénévoles. Des ateliers de menuiserie, d’électronique ou de dessin sont organisés pour les garçons par des pères de famille, membres de la communauté.
Pratiques cultuelles, rites et textes sacrés
La chapelle est le principal lieu de culte. La décoration est simple et épurée. Il n’y a ni cierge ni plateau pour les offrandes. L’autel rituel est placé à l’avant des sièges où prend place l’assistance, au centre de la chapelle. Derrière l’autel se trouve le tabernacle qui contient le ciboire avec les hosties. Une image de Jésus accompagné de Marie est placée au-dessus du tabernacle afin de rappeler les deux personnages présents dans l’Eucharistie. À droite de l’autel se trouve une croix en vitrail. Une image représentant la cosmologie est placée à gauche de l’autel. Des objets rituels arborant le chiffre cinq s’ajoutent en référence à la Quinternité.
Les rituels pratiqués par le groupe sont ceux de l’Église catholique romaine. Une messe quotidienne est célébrée à la chapelle du Centre Spiri-Maria en plus d’une messe spéciale le dimanche. Néanmoins, avec la création de l’Église de Jean, certains éléments spécifiques à l’Armée de Marie s’ajoutent aux pratiques traditionnelles de l’Église catholique romaine. Les fidèles font souvent un signe de croix avec la main droite en touchant le front, le cœur, l’épaule gauche puis l’épaule droite. Tout en faisant le geste, ils récitent : « Au nom du Père et du Fils et de la Mère et de la Fille dans l’unité de l’Esprit. Amen ». Le « Symbole des apôtres », les prières du « Notre Père » et du « Je vous salue, Marie » se récitent comme on le fait dans l’Église catholique. Néanmoins, on ajoute à la messe la prière « Dame de tous les peuples ». En plus de l’Ancien et du Nouveau Testament, tous les textes religieux particuliers au groupe peuvent être utilisés pendant la messe. Le prêtre présidant à la cérémonie mentionne souvent la Dame, Marie, Mère Paul-Marie ou Marie-Paule Giguère. Ainsi, dès le début de la messe, il dit à l’assemblée « Que la paix du Seigneur et de la Dame soit avec vous ». Lors de l’Eucharistie, le pain et le vin sont offerts comme dans le rituel catholique, mais des éléments cultuels relatifs à la dévotion à la Dame s’ajoutent au rite. Après la bénédiction du vin, le prêtre officiant dit :
« Plus tard, à l’autre charnière des temps, Marie-Paule fut totalement configurée à Jésus-Christ, rendant grâce à sa mère divine à chaque jour de sa vie terrestre, Elle vécut, dans la totalité de son être, la même transformation que lui. Femme, elle rejoignit l’homme en eucharistie, C’est pourquoi désormais les paroles Ceci est mon corps, ceci est mon sang, symbolise à la fois l’œuvre du rédempteur et l’œuvre de la co-rédemptrice. L’une et l’autre marquant l’accomplissement d’un mystère unique, la réintégration de notre humanité, dans le plan d’amour de Dieu. Voici le corps et le sang du Christ Total, Jésus Christ Paul-Marie ».
Après avoir élevé l’hostie et le vin, l’assistance proclame en chœur : « Nous proclamons ta mort Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire. Et toi Paul-Marie, Dame Immaculée, nous t’associons dans la même foi, la même espérance et le même amour à tout jamais ». Ainsi, à de nombreux moments durant la messe, Marie-Paule Giguère est mentionnée par les officiants et l’assistance. Sa personne est associée au rituel. On mentionne également le nom du Padre Jean-Pierre Mastropietro dans les intentions de prière au lieu du nom du Pape et de l’évêque du diocèse. Les messes sont célébrées en français, en anglais et en néerlandais dans trois chapelles distinctes. Les messes peuvent être visionnées chaque semaine en direct ou en différé sur le site internet du groupe et une partie du texte de la messe est téléchargeable.
Aux textes sacrés traditionnels de l’Église catholique s’ajoutent les volumes de Vie d’amour, l’autobiographie de la fondatrice. Ces ouvrages sont considérés comme des écritures saintes dictées par Dieu à Marie-Paule Giguère et des passages en sont récités pendant la messe. S’ajoutent à ces lectures les Livres blancs relatant les grâces reçues par Marie-Paule. Les ouvrages de Marc Bosquart et de Raoul Auclair font aussi partie des livres religieux du groupe. Les messes peuvent intégrer des lectures tirées de la vie de personnages canonisés, comme Sainte Hildegarde, une mystique du XIIe siècle, ou des textes d’autres prophètes reconnus par le groupe. La vie des saints et prophètes sont les thèmes des messes quotidiennes. La mère et le père de Marie-Paule Giguère ayant d’ailleurs été canonisés par le mouvement, des récits de leur vie peuvent s’ajouter aux cérémonies. Tous ces écrits ont été approuvés par les responsables : leur lecture quotidienne est non seulement fortement recommandée aux fidèles, mais ils peuvent toujours s’insérer à l’intérieur de la liturgie.
Les sacrements de l’Église sont administrés par les autorités religieuses au sein du mouvement. Les sacrements demeurent les mêmes que ceux de l’Église catholique. La pratique du chapelet et du rosaire est courante et peut aussi être visionnée en direct ou en différé depuis le site internet. Une statue de la Dame de tous les peuples trône dans la chapelle, à gauche de l’autel. L’iconographie de la statue correspond à celle de la Dame de tous les peuples d’Amsterdam. Un livre avec les paroles de Marie-Paule Giguère se trouve devant la statue avec à ses côtés une photo de la fondatrice. Résidents et résidentes sont encouragés à maintenir la dévotion perpétuelle à la Dame de tous les peuples. À tour de rôle, jour et nuit, des membres de la communauté se relaient devant la statue de la Dame de tous les peuples et la vénèrent de leurs prières. En 2012, treize écriteaux sont inaugurés dans la chapelle du Centre Spiri-Maria. Inspiré des chemins de croix représentant la Passion de Jésus Christ que l’on trouve dans les églises catholiques, les écriteaux de l’Armée de Marie illustrent le parcours mystique de Marie-Paule Giguère. Une messe anniversaire est célébrée tous les 25 avril, la date du décès de la fondatrice. En cette journée, à 18h30 on récite un chapelet particulier, à 19h on célèbre une heure sainte et à 20 h commence la messe anniversaire.
La Communauté organise plusieurs journées de prières spéciales et des journées de pénitence où les participants se rassemblent pour prier. La prière est une pratique cultuelle très encouragée. Le mouvement a aussi organisé des processions telles qu’on en retrouve dans l’Église catholique et participe à des pèlerinages partout dans le monde. Le groupe estime que les chevaliers de Marie ont participé à vingt-cinq pèlerinages dans quinze pays différents entre 1974 et 1995. Lors de ses voyages, les membres se rendent en des lieux importants de la chrétienté, en particulier dans les lieux associés à la dévotion à la Vierge Marie. Ils vont y prier pour le salut de leur âme et pour le salut de l’humanité par le Rédempteur et la Co-rédemptrice.
Médias :
Sites Web : http://www.communaute-dame.qc.ca/
Radio : http://radioamour.com/
Journal : https://www.publicationsleroyaume.org/
Ancien site web (dernière mise à jour en 2011) : www.royaume-amour-verite.org
Quelques références
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Bosquart, Marc. Le Rédempteur et la Co-Rédemptrice : Éléments pour servir à la contemplation d’un Mystère. Limoilou, Famille des fils et filles de Marie, 1986.
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