On trouve de tout sur Amazon, même un prêtre !

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Si plusieurs doutent de la possibilité d’arrimage harmonieux entre religion et technologie, c’est qu’ils n’ont pas encore entendu parler du phénomène de l’heure au Japon : croiriez-vous qu’on puisse commander un prêtre sur Amazon ?

Le Shintô est la religion indigène du peuple japonais. Il est ici essentiel de bien saisir le rapport entre le Shintô et ses prêtres, et l’on nous permettra de citer à ce sujet les précisions de Michael Pye, un spécialiste reconnu des religions du Japon : « Littéralement, le Shintô signifie ‟la voie des kami”, c’est-à-dire la voie des dieux ou des esprits. Les kami sont des figures mythiques dont les récits sont contés dans le Kojiki et le Nihongi, des forces de la nature de toute sorte qui habitent les montagnes, les forêts, les sources et les rivières, etc. […] Dans le Shintô, le sacré est donc localisé à l’intérieur d’un espace bien défini. […] Les principaux rituels associés au Shintô sont d’une part la purification des hommes et, d’autre part, les offrandes aux kami. Le rituel de purification, accompli par un prêtre shintoïste, est censé provoquer la disparition de l’impur (kegare) né des avanies de la vie quotidienne, et de plus, dans un sens positif, une clarification de l’esprit humain, c’est-à-dire, une purification des attitudes et des motivations » (Pye, 2002/3, 54-55). Le prêtre shintoïste est donc une personne qui connaît les rites susceptibles d’agir sur les forces surnaturelles, en particulier à l’occasion de la mort.

L’obosan-bin – le service de livraison de prêtres à domicile – révolutionne présentement le marché des services funéraires dans un Japon déjà à la fine pointe de la technologie. Le fonctionnement est simple : les clients peuvent réserver les services d’un prêtre par l’entremise de la plate-forme Amazon et sélectionner un forfait approprié à leurs besoins. Les défenseurs de cette pratique, néanmoins controversée, affirment que, de cette façon, le prix à payer est fixé à l’avance. La commande en ligne permet de plus à de nombreux Japonais qui ne fréquentent pas régulièrement le temple d’avoir tout de même accès à des services religieux et de maintenir vivante de cette façon une tradition qui tend à s’affaiblir auprès des nouvelles générations. Légitime, ce commerce ? Il fait en tous cas surgir des questions de fond concernant les pratiques religieuses : les services d’un prêtre sont-ils comparables à ceux de n’importe quel autre professionnel ? Et si tel est le cas, doit-on les taxer ?

Un certain imaginaire collectif suppose d’emblée que la technologie et la religion sont tout à fait irréconciliables, alors qu’ici les deux réalités semblent faire bon ménage. Loin de nous l’idée de lancer un débat sur le sujet : les opinions concernant la légitimité de cette nouvelle forme de marché du religieux sont déjà partagées. Il nous semblait toutefois pertinent de soulever la question. Les différentes Églises du Canada ne semblent pas prêtes à emboîter le pas aux religions japonaises. Il est tout de même permis de rêver : aimeriez-vous commander votre curé sur internet ?

Pour en savoir plus :

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